(Ceci est une traduction de la version originale en néerlandais)
La Belgique est une particratie
Nous sommes supposés penser que nous vivons dans un pays démocratique grâce aux élections, la médiatisation des débats entre les partis et l’existence de plusieurs organisations de société civile. Rien n’est moins vrai. Même les politiciens admettrons que la plupart des décisions sont prises à la tête de leur parti. Un exemple est le livre de Hendrik Vuye et Veerle Wouters « Sleutels tot Ontgrendeling » qui étonnamment n’est pas un plaidoyer pour (un chemin vers) l’indépendance flamande, mais surtout un témoignage des mauvaises pratiques qu’on trouve à tous les niveaux, donc aussi au niveau flamand. Beaucoup de choses sont liées au communautaire, mais aussi à la manière dont les partis fonctionnent. Ainsi, il est devenu très difficile pour un membre du parlement de garder une certaine indépendance. Parce qu’en pratique, le parlement est dirigé par les partis et leur chefs décident entre eux. Cela résulte en une culture de stratégies de pouvoir, et de partage du gâteau entre les partis gouvernants, entretenant le statu quo. Ce dont on a besoin, c’est la recherche d’un dénominateur commun, la res publica (En latin la chose publique, qui a donné le mot république), où l’on recherche la meilleure solution pour le citoyen. Ils font un appel au/à la citoyen/ne afin qu’il/elle fasse entendre sa voix.
Les partis s’associent aussi avec beaucoup d’organisations et vont les défendre parce qu’ils ont besoin de leur réseau. Le citoyen est de nouveau dépassé. L’ACW pourrait financer la perte de Belfius avec ses propres réserves, mais choisit de faire payer la débacle d’Arco avec les impôts des citoyens [2]. En plus, le CD&V veut abolir la pré-pension, mais l’ACV bloque. Cette pilarisation (organisation autour de piliers) est quelque chose dont Mieke Vogels (Groen) dit que la N-VA a raison de dire que chaque progressif devrait se sentir scandalisé par l’argent que cela coûte. [3] Les derniers articles sur les élections à l’Université de Gand montrent de nouveau que cette pilarisation est encore bien présente dans la société.
Quand Dutordoir a été proposé comme nouveau chef de la SNCB, la N-VA était d’abord contre. Jusqu’à ce que l’on crée des mandats en plus dans le conseil d’administration pour y placer des gens de la N-VA. A chaque fois, l’équilibre politique doit être atteint.
Retour à la démocratie : les éléments de base d’un système démocratique
Nous avons parlé de comment les partis déterminent la politique par leurs stratégies de compromis, si nous ne voulons pas cela, qu’est-ce que cela signifiera d’avoir une vraie démocratie ?
Dans les présentations de democratie.nu, un mouvement de citoyens indépendants qui défend les idées de la vraie démocratie, la démocratie veut littéralement dire que le pouvoir doit être chez les gens (la souveraineté du peuple). Cela signifie que les gens doivent au moins avoir confiance dans le système et l’accepter. Il donne en bref, les éléments de base de la démocratie:
- Les initiatives peuvent déterminer l’agenda
- La discussion et le débat est nécessaire
- Une décision (du peuple) se met en législation
- Liberté d’expression
- Liberté de réunion
- Transparence du secteur public
- Respect pour tout le monde
- Une justice fiable
Pourquoi a-t-on besoin de démocratie ?
Paul Verhaeghe explique dans son livre « Autoriteit » pourquoi une bonne démocratie est intrinsèquement – et du point psychologique au sens large – nécessaire pour les gens. Les gens cherchent un sens et une direction dans leur vie, et au long de leur chemin dans la vie, ils cherchent des autres gens pour faire confiance à leur expérience « comme autorité ». Par le passé, ce sens et cette direction étaient parfois donnés par l’Eglise, parfois utilisé comme instrument de pouvoir par des dictateurs. Maintenant, l’Eglise ne joue plus ce rôle dans la société, et notre « direction » moderne est plutôt donnée par l’économie et nos idées parfois cadrées sur des prestations à court terme. Si nous faisons bien notre boulot, cela nous rapporterait de l’argent. Compatible avec les idées de la méritocratie néoliberale (https://www.youtube.com/watch?v=dzLv3rfnOVw) Les partis abusent de ces idées comme les dictateurs (avec l’Eglise) en disant qu’on ne sait pas faire certaines choses à cause de l’économie (il n’y a pas d’alternative que de réduire les budgets petit à petit), mais en pratique ils divisent la tarte entre eux. A partir de son expérience de psychothérapeute, Paul Verhaeghe voit que cette direction de « prestation » est ces buts « économiques » force trop de gens en thérapie, où malheureusement les même buts sont appliqués, menant à l’anxiété, la souffrance et beaucoup de catastrophes humaines dans une société moderne qui ne devraient pas être là. Sa solution peut être perçue comme une changement de « direction » vers l’intérêt commun ou la res publica, où les gens décident entre eux ce qui est le mieux pour eux. Les gens entre eux sont la bonne autorité.
Une autre perspective est de regarder ce que rend les gens heureux, comme on peut lire dans la publication de democratie.nu [4], la partie sur « Economie, démocratie et le bonheur » de Jos Verhulst. On voit que les jeunes sont plus heureux que les gens de quarante ans, les mariés plus heureux que les célibataires. Aussi des paramètres économiques jouent un rôle : salaire, chômage et inflation. En Europe et dans d’autres pays avec des régimes pas trop autoritaires, il y a une corrélation forte entre la confiance au gouvernement et le sentiment de bonheur.
Mais il n’y a qu’un pays dans le monde (la Suisse) où le peuple peut directement de manière pratique créer des lois et ainsi parcourir l’agenda de la classe politique. Par contre, des 26 cantons, certains sont plus démocratiques que des autres. Ceci était une opportunité pour une enquête qui allait étudier la relation entre la démocratie et le bonheur. Sur une échelle démocratique de 1 à 6 (canton plus bas: 1.75, plus haut 5.69) une augmentation de 1 point correspondait à une augmentation en bonheur, comme avec les gens qui changent d’une catégorie de salaire plus bas à la catégorie avant plus bas, mais ici cela s’appliquait pour tout le monde. Le bonheur augmente de deux manières: la politique est mieux en accord avec ce que les citoyens veulent, mais les citoyens peuvent aussi mieux déterminer leur propre destin.
Dans les particraties on est souvent contre le réferendum à l’initiative du peuple, parce que les citoyens, malgré la propagande massive de l’élite politique et économique, montrent une tendance forte à construire leur propre souveraineté et la confirmer, par exemple des taxes plus basses (mais quand même assez pour l’infrastructure, …), taxes où il y a quelque chose en retour, plus à dire pour le niveau local… Aussi plus d’autonomie locale amène à plus de bonheur. En Belgique par contre, les communes consacrent 6,6% des dépenses, en Suisse et Danemark, c’est un tiers. Qui aspire à la démocratie, aspire au bonheur.
Qui aspire à la démocratie, aspire au bonheur.
Pourquoi les partis politiques ne sont pas assez bons ?
David van Reybrouck écrit ceci dans son livre « Contre les Elections » : d’une enquête à grande échelle internationale, il ressort que plus que 91% des répondants voient la démocratie comme une bonne manière de gérer un pays. La même enquête montre que la confiance dans les institutions démocratiques est historiquement basse.
La démocratie est supposée être la forme la moins mauvaise de gouverner parce qu’elle est censée trouver un bon équilibre entre la détermination et la légitimité. Aujourd’hui les démocraties sont en proie à une crise de légitimité et d’efficacité en même temps.
1 Legitimité
- De plus en plus de citoyens ne votent pas (en Europe 25%, aux Etats-Unis de 40 à 60%). Le parlement est-il encore représentatif ?
- 10% à 30% des électeurs changent de parti chaque élection
- De moins en moins de personnes adhèrent à un parti politique
2 Efficacité
- La formation d’un gouvernement prend de plus en plus de temps (en Belgique récemment un an et demi, mais aussi dans des autres pays) parce que les accords de gouvernement deviennent de plus en plus détaillés : les partis se méfient.
- Les partis de gouvernement sont punis de plus en plus lourdement. Rester sur le côté est électoralement plus avantageux que de diriger avec une bonne vision
- Gouverner va de plus en plus lentement parce que les gouvernements sont liés par des gouvernements hiérarchiquement supérieurs, des agences de notation, des accords internationaux, …
Personne ne s’identifie plus avec les partis qui ont encore le pouvoir, mais qui sont toujours basés sur des idées du (début du) 20ième siècle. Parfois ces partis vont essayer de parler de la participation des citoyens en faisant semblant d’être démocratique. Une manière de juger si c’est voulu sérieusement est par l’échelle d’Arnstein [5] Ou peut-être vont-ils vouloir organiser un référendum, mais selon democratie.nu cela n’est pas un référendum, mais un plébiscite parce que l’initiative doit venir du peuple et si les politiciens veulent l’organiser, ils doivent suivre les mêmes règles que le peuple. Un plébiscite comme référendum est l’outil favori des dictateurs, pensons à la Turquie ou au Brexit.
Quid des élections et de la « démocratie » représentative ?
Les élections n’ont pas été inventées en faveur de la démocratie, mais contre. Après la Révolution française, des élections ont été introduites comme prétexte. Le peuple voulait la démocratie, mais les dirigeants avaient peur, donc ils ont organisé des élections, qui étaient plus faciles à remporter pour les gens qui pouvaient s’en occuper à temps plein. Avant, le tirage au sort était plus connu comme un bon système et par exemple l’antique Athènes avait beaucoup de succès avec ce système. David van Reybrouck décrit dans « Contre les Elections »:
« Le tirage au sort, l’instrument le plus démocratique de tous les instruments a mordu la poussière au 18ième
face aux élections. Des élections n’ont jamais été pensées comme un instrument
démocratique, mais comme une procédure pour mettre au pouvoir l’aristocratie non-héréditaire.
En élargissant le droit de vote, cette procédure a été démocratisée, mais sans s’éloigner de la division
fondamentale, oligarchique entre les gouvernants et les gouvernés, entre les politiciens et les électeurs.
(…) Il y avait toujours un haut et un bas, toujours un gouvernement et ses sujets.
Le vote était un ascenseur de service qui apportait des individus en haut. (…)
Democratie.nu ajoute qu’il y a des éléments démocratiques ajoutés à notre « démocratie » représentative : liberté d’opinion, vote pour tout le monde, indépendance de l’élu, droit de pétition, des élections régulières.
Mais en pratique, on voit que notre système politique est une aristocratie électorale avec une dictature des partis, avec beaucoup d’attention des médias et quelques éléments démocratiques.
Quelles sont les solutions?
Il n’existe pas une solution fixe, mais il est possible que ce soit une combinaison des solutions suivantes :
1 Transparence : Nous payons le gouvernement, donc c’est aussi logique qu’ils nous donnent une idée de ce qu’ils font avec. La transparence permet de contrôler ceux qui sont au pouvoir et les citoyens peuvent réfléchir à la meilleure solution. L’open data et des plateformes comme transparencia.be et cumuleo.be montrent que la technologie ouvre beaucoup de possibilités.
2 Référendums : Le citoyen doit avoir la possibilité d’obtenir un référendum contraignant avec suffisamment de signatures. C’est important avec un référendum de faire une bonne brochure informative qui explique la question et les arguments pour et contre. En Suisse, cela existe. Une autre forme, c’est la démocratie liquide qui est la version informatisée, où on pourrait avoir en continu des référenda avec la possibilité de donner procuration à quelqu’un d’autre.
3 Tirage au sort : En désignant régulièrement d’autres personnes au pouvoir via un tirage au sort, on évite que certainess ne saisissent trop de pouvoir. Terryl Bouricius a démontré de manière scientifique que les gens tirés au sort peuvent prendre les bonnes décisions.
4 Au niveau local : Dans les petites communes, on n’a pas besoin de partis. Il s’agit du voisinage local où les gens peuvent décider entre eux ce qui est le mieux. « Flatpack Democracy » [6][7] montre comment les gens dans une petite ville (Frome) ont commencé un parti indépendant des partis existants et après avoir gagné une élection avec une majorité, ils ont gagné la prochaine avec 100%. Parce que les idées doivent simplement venir des citoyens. Sarah Van Liefferinge a aussi écrit un article là-dessus. [8]
[1] https://www.facebook.com/notes/johan-sanctorum/ontgrendel-je-geest-wouters-en-vuye-of-het-levende-argument-tegen-de-particratie/10154434778037616
[2] https://nl.express.live/2016/12/25/119782arco-verliezen-schuldigen/
[3] http://www.demorgen.be/interviewreportage/-vlaanderen-wordt-nog-altijd-bezet-door-de-zuilen-be842be8/
[4] https://drive.google.com/file/d/0B7uX2N2KHmqtQkFuZFM5UTlGd28/view?usp=sharing
[5] http://lithgow-schmidt.dk/sherry-arnstein/ladder-of-citizen-participation.html
[6] http://www.flatpackdemocracy.co.uk/
[7] http://www.ademloos.be/nieuws/welkom-frome-waar-de-burgers-de-touwtjes-handen-hebben
[8] http://www.knack.be/nieuws/belgie/wat-stelt-onze-representatieve-democratie-nog-voor-als-steeds-minder-mensen-gaan-stemmen/article-opinion-782711.html