Le droit d’initiative des citoyens

Récemment, la Chambre des représentants a lancé un site web pour soumettre en ligne des pétitions et des propositions législatives. C’est un petit pas positif vers plus de démocratie, mais en même temps il menace de nous éloigner d’une démocratie réelle et directe.

Pour commencer, quelques points positifs :

  • Tout le monde peut soumettre une proposition, quel que soit son âge ou sa nationalité. Seuls l’âge minimum de 16 ans et la résidence en Belgique sont requis pour signer une pétition.
  • Les demandes peuvent être soumises et signées en ligne avec l’eID. Cela garantit une protection de notre vie privée au niveau fédéral et supprime les obstacles administratifs.
  • La direction qui est prise est est double. D’une part, l’Internet devient une condition de base pratique pour participer à la vie politique. (l’accès gratuit à Internet comme droit fondamental). D’autre part, elle ouvre la voie à des élections numériques. Comme l’eID peut être utilisée pour les pétitions, les taxes et le soutien à des listes électorales, elle constitue un petit pas vers des élections en ligne.
Palais de la Nation
Paleis der Natie/Palais de la Nation, by Oakenchips is licensed under CC BY-SA

Toutefois, comme le montrent certaines des premières initiatives, il existe également un risque. Les partis peuvent légitimer leurs propres programmes sous couvert de participation citoyenne. Les collaborateurs d’un parti lancent une initiative et leurs partisans la soutiennent en masse. Ce phénomène est appelé vote brigading (« brigade de vote »). Cela ne semble pas très agréable, mais ce n’est peut-être pas si mal. Les citoyens qui sont politiquement actifs seront plus enclins à faire usage de cette possibilité. De plus, il met à l’ordre du jour une idée plutôt qu’un parti, encore moins une personnalité médiatique. Alors une suggestion : rendre les propositions anonymes, ne pas montrez de qui vient l’initiative, afin que les citoyens (avec ou sans carte de membre du parti) puissent choisir s’ils sont favorables à une idée.


D’autre part, cela révèle un problème plus grand et plus profond avec ce moyen de participation. Le citoyen politiquement actif (et membre du parti) est généralement un homme, diplômé, de classe moyenne, etc… Pour connaître la volonté du citoyen, cela ne suffit donc pas. Des moyens tels qu’une assemblée de citoyens tirés au sort ou un référendum sont plus légitimes.


Nous pouvons également faire d’autres observations critiques sur cette innovation, comme le seuil non démocratique de 25.000 signatures ou le caractère non contraignant de ces propositions citoyennes. De plus, il manque l’essentiel : la concertation entre les citoyens et la décision finale par les citoyens. Les initiatives citoyennes qui ne plaisent pas à la majorité des partis n’ont aucune chance de succès, malgré leur légitimité démocratique. Cette initiative vise à donner plus de légitimité à la démocratie représentative, mais ce faisant, elle donne surtout plus de légitimité à la particratie. Le Parti Pirate défend une démocratie radicale, directe ou liquide dans laquelle chaque citoyen qui le souhaite a non seulement le droit de faire des propositions, mais aussi d’entrer en dialogue et de décider lui-même


Dans une démocratie directe ou liquide, chaque citoyen peut faire des propositions en toute indépendance et décider quelles propositions¹ il accepte ou rejette. Ceux qui ne souhaitent pas le faire peuvent autoriser une tierce personne (un représentant).


¹ Regardez par vous-même cette proposition intéressante que de nombreux pirates soutiennent https://dekamer.mijnopinie.belgium.be/initiatives/i-430?locale=fr