Ce mercredi 12 septembre, les député·e·s du Parlement européen ont voté en faveur de la proposition Voss sur le droit d’auteur. Pour résumer l’enjeu : une directive européenne était proposée au vote du Parlement. Son objectif annoncé était de mieux protéger et rémunérer les auteurs et artistes, mais ses effets concrets seront une censure du contenu mis en ligne (via des algorithmes dont les limites ont déjà été démontrées) et une circulation de l’information réduite (à cause d’une licence payante que les éditeurs peuvent exiger des plateformes pour y publier leur contenu). Relisez l’avis de Séverine Dusollier, professeur en droit d’auteur, sur cette directive.
Ce résultat est bien évidemment très décevant pour nous, les Pirates. Mais loin de nous décourager, nous tenons à mettre certaines choses au clair avec tout le monde avant de reprendre le combat.
Le débat autour de cette question du droit d’auteur n’a jamais pu avoir lieu dans des conditions idéales. En effet, une certaine presse ne s’est pas privée de caricaturer les forces en présence : d’un côté la presse, dernier rempart de la démocratie avant le chaos, de l’autre les militants des libertés – dont font partie les Pirates – surnommés les idiots utiles des GAFAM. Ce n’est pas seulement grotesque et infondé. C’est aussi profondément insultant pour ces personnes qui s’investissent depuis de nombreuses années pour défendre les droits de chacun.
Jusqu’à preuve du contraire nous n’avons pas, comme une bonne bonne partie de la presse (et tant d’autres) :
– négocié de partenariats avec Google ;
– engagé un staff dédié à la diffusion de contenu sur Facebook ;
– fait des choix stratégiques catastrophiques depuis des années et ne nous sommes pas rendus totalement dépendants des GAFAM.
Nous avons toujours défendu la presse comme étant un pouvoir essentiel dans une saine démocratie. Nous avons pourtant constaté sa démission quasi totale dans le débat concernant cette réforme. Le travail journalistique a été mis de côté pour laisser place à un lobbying détestable. Une directive européenne ne sera pas suffisante pour sauver cette presse-là !
Et maintenant ?
Le vote de mercredi ne signifie pas que la réforme est approuvée. Le mandat a été donné au Parlement pour que celui-ci négocie avec la Commission et le Conseil (le trilogue – qui se déroule, il fallait malheureusement s’y attendre, à huis clos). Une fois un texte commun approuvé par ces 3 institutions, celui-ci sera soumis une dernière fois au Parlement européen pour validation, sans doute au printemps 2019. Il devra ensuite être transposé dans chacun des Etats-membres.
Les député·e·s qui ont fait le choix de soutenir cette directive devront l’assumer. Ils ont nié de nombreux avis d’experts du net, de l’ONU et d’académiques qui ont tiré la sonnette d’alarme. Mais ils ont tous un nom, un parti et des échéances électorales qui peuvent être synonymes de sanctions par l’électeur mécontent de ce vote :
Nous continuerons la lutte pour un internet libre, ouvert et décentralisé, partout où elle sera possible avec les moyens dont nous disposons, et ce même si le résultat de ce mercredi avait été positif pour nous. Vous pouvez contacter les eurodéputés, pour remercier ceux qui ont voté contre la directive et interroger ceux qui ont voté en faveur de celle-ci. Vous pouvez aussi rejoindre, aider ou soutenir la NURPA, EDRI et les Pirates évidemment. Aux intérêts mal placés des uns, nous opposerons nos convictions les plus profondes.